Au cours des dernières années, le personnel de recherche du Musée canadien de l’histoire a collecté du matériel et documenté divers aspects de la pandémie de COVID-19 au Canada.
Cette publication est consacrée à un programme éducatif de longue date qui a été définitivement aboli à la suite de la pandémie.
Le mois de mars dernier a marqué l’anniversaire de l’adoption quasi mondiale de restrictions de santé publique en réponse à l’épidémie de COVID-19 en 2020. Ces politiques ont transformé les écoles, les lieux de travail et d’autres espaces publics. De nombreuses entreprises et organisations ont été contraintes de fermer leurs portes, notamment Rencontres du Canada, un forum de longue date qui réunissait des jeunes de tout le pays pour explorer l’histoire et la culture du Canada.
Photo : Historica Canada
La fin du programme Rencontres du Canada
En mars 2020, un calme inhabituel régnait dans le quartier de Manor Park, à Ottawa. Le flux hebdomadaire d’ados participant au programme Rencontres du Canada s’était soudainement interrompu à la suite de l’annulation des rencontres en personne en raison de la pandémie de COVID-19. En janvier 2021, moins d’un an plus tard, le programme prenait fin pour de bon.
L’annonce de l’abolition du programme a ravivé de nombreux souvenirs et suscité une certaine tristesse au sein de son vaste réseau d’élèves d’anciennes cohortes, de membres du personnel enseignant et autres bénévoles. Pam Wattamaniuk a été bénévole en tant qu’enseignante-monitrice pendant 28 ans et a participé à la dernière offre du programme en 2020 : « Nous savions que le programme Rencontres du Canada était temporairement mis en veille en raison de la COVID, se souvient-elle, mais nous avons eu le cœur brisé en apprenant que le programme était définitivement aboli. Il s’agit d’une perte indéniable pour notre pays. Toutes les personnes qui ont participé ont bénéficié des nombreuses possibilités offertes dans le cadre de ce programme, notamment la possibilité de rencontrer et de discuter avec d’autres jeunes d’un bout à l’autre du pays. »
Ce programme unique, créé pour favoriser l’unité nationale chez les jeunes à une époque où la perception d’une crise nationale dominait, sera conservé dans le cadre du riche éventail d’expériences canadiennes représentées dans les collections du Musée.
Premières affiches du programme, vers 1983-1985. Musée canadien de l’histoire, 2023.40
Les origines de Rencontres du Canada
Rencontres du Canada était un forum jeunesse national qui réunissait des groupes d’environ 100 jeunes de partout au pays à Ottawa, tout au long de l’année scolaire, pour des conférences d’une semaine articulées autour de thèmes particuliers. Il s’agissait de l’une des plus grandes rencontres d’échange de jeunes du pays, qui a touché la vie de plus de 113 000 ados au Canada, sans parler de milliers de bénévoles.
Au départ, il s’agissait d’une idée de l’organisation qui est devenue le Conseil de l’unité canadienne. Le Conseil est une organisation pancanadienne qui a vu le jour au milieu des années 1960. La Révolution tranquille au Québec attisait les sentiments nationalistes et séparatistes dans la province, suscitant l’inquiétude des cercles fédéralistes. Concerné principalement par la menace perçue de la séparation du Québec, le Conseil a travaillé activement pour le camp du « non » lors des deux référendums québécois. Il a également cherché à lancer des programmes et des initiatives pour réparer ce qu’il considérait être une identité et une unité nationales chancelantes.
En 1978, le Conseil a commencé à planifier un programme de ce type dans la foulée d’un sondage national montrant un soutien pour des programmes de jeunesse à l’échelle nationale conçus pour favoriser l’identité canadienne et développer la connaissance du pays.
Un étui à guitare en cuir noir sur lequel une grande enseigne en noir et blanc est collée, indiquant « Rencontres du Canada ».
Le siège et le programme
Le Conseil a acheté une ancienne école dans le quartier de Manor Park à Ottawa et l’a réaménagée en y installant des dortoirs, des logements pour les bénévoles, une cafétéria et un auditorium, ainsi que d’autres installations. Il a été rebaptisé le Centre Terry Fox de la jeunesse canadienne en 1982 et a accueilli sa première cohorte du programme à l’automne.
Le programme comportait trois éléments clés :
- Des séances sur les institutions canadiennes dans la région de la capitale nationale;
- Des modules éducatifs sur des sujets tels que les langues officielles, l’engagement des jeunes, la paix, l’histoire du Canada, etc.;
- Des séances axées sur les carrières dans des domaines aussi variés que les arts et la culture, l’écologie et l’environnement, les affaires internationales, le journalisme et la communication, la politique, la science et la technologie, le sport et la forme physique, et bien d’autres encore.
En 2006, le manque de financement du Conseil a conduit la Fondation Historica (aujourd’hui Historica Canada) à reprendre le programme. Le programme a également bénéficié du soutien de plusieurs commanditaires, dont VIA Rail et la Légion royale canadienne.
Photo : Historica Canada.
Abolition du programme et collection
« La décision d’abolir définitivement le programme a été très douloureuse, mais nécessaire, a déclaré Anthony Wilson-Smith, président et chef de la direction d’Historica Canada. L’entretien de nos installations pendant la fermeture nous coutait plusieurs milliers de dollars par mois, sans nos sources de revenus habituelles. Compte tenu de toutes les préoccupations en matière de santé, nous ne savions pas quand nous serions en mesure de rouvrir et, le cas échéant, quelles personnes seraient disposées à venir. En tant qu’organisation caritative, nous ne pouvions pas nous permettre de rouvrir le Centre sans mettre en péril nos autres programmes. »
Après l’abolition du programme, le Centre Terry Fox pour la jeunesse a été mis en vente par Historica Canada. Il a été acheté par un acheteur anonyme dans le but de créer un centre communautaire. Le conseil communautaire de Manor Park sera le principal concepteur de programme pour le bâtiment.
Photo : Historica Canada
Le Musée canadien de l’histoire a travaillé avec des membres d’Historica Canada et du conseil communautaire pour acquérir certains objets du bâtiment avant le début des travaux de démolition et de rénovation.
En tant qu’ancien élève du programme (j’ai fait le voyage depuis Kamloops, en Colombie-Britannique, pour participer à une semaine sur la politique canadienne au milieu des années 1990), parcourir les couloirs du bâtiment m’a donné l’impression de revivre mon adolescence. Les souvenirs des repas chaotiques dans l’auditorium, des personnalités invitées et des simulacres d’assemblées politiques ont envahi mon esprit alors que nous passions en revue les documents dans l’espace désormais vide. Un étui de guitare solitaire, avec un autocollant des Rencontres fièrement affiché sur le côté, a rappelé des souvenirs de spectacles improvisés et d’accompagnements enthousiastes qui rassemblaient les élèves dans les grands espaces du dortoir au moment du couvre-feu.
Le bâtiment et le site, quant à eux, deviendront sans doute bientôt un centre d’activité bourdonnant. Et l’héritage du programme se perpétuera à travers les centaines de milliers de vies qu’il a touchées. Il sera également conservé dans les collections du Musée canadien de l’histoire.
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James Trepanier est le conservateur du Musée canadien de l’histoire pour la jeunesse et les mouvements sociaux. Ses domaines de recherche portent sur l’histoire sociale, culturelle et politique du Canada au XXe siècle. Originaire de la Colombie-Britannique, James reconnait que les débats à la table familiale ont contribué à éveiller son intérêt pour l’histoire et l’éducation.